AVANT-PROPOS
Depuis près de trois décennies, le Quebec Community Groups Network (QCGN) travaille avec ses membres, ses partenaires et ses intervenants afin de produire un plan de développement communautaire en constante évolution, qui exprime les besoins de la communauté, affirme ses priorités communes et encadre son action collective. Cette démarche a permis à notre communauté non seulement d’avoir son mot à dire dans l’orientation de sa croissance à long terme, mais aussi de disposer d’un cadre de référence pragmatique pour relever les défis à court terme.
Le QCGN est fier d’avoir soutenu la plus récente itération du processus d’établissement des priorités, guidé par les tables rondes sur la vitalité communautaire. En tant qu’organisme central ayant soutenu l’élaboration du Plan de développement communautaire 2022-2027 pour le Québec d’expression anglaise, nous tenons à exprimer notre sincère gratitude à tous ceux qui ont participé à sa création et à son développement, plus particulièrement aux participants des tables rondes sur la vitalité communautaire, qui ont été le fer de lance de cette entreprise essentielle tout en lui servant de guide.
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Interlocuteur majeur entre la communauté d’expression anglaise du Québec et tous les paliers gouvernementaux, le QCGN a pour rôle de piloter ce processus de planification. Nous mobilisons l’ensemble de la communauté afin qu’elle contribue à mieux cerner et canaliser les priorités émergentes pour les décideurs. Au cours des dernières années, le QCGN a reçu un message fort et clair de la communauté concernant le leadership nécessaire pour guider l’établissement et l’alignement des priorités communes. C’est dans cet esprit que nous avons contribué à la création des tables rondes sur la vitalité communautaire. Et c’est également dans cet esprit que nous continuerons à les soutenir activement dans les années à venir.
Travaillons ensemble pour une communauté plus dynamique : le Plan de développement communautaire 2022-2027 pour le Québec d’expression anglaise est le fruit de plus de deux ans de consultation soutenue. Plus de 80 organismes communautaires et institutions au service des Québécois d’expression anglaise y ont participé, collaboré et contribué. Poursuivant un dialogue continu, les intervenants ont travaillé tous ensemble. Nous avons réaffirmé une compréhension commune de ce qui fait la vitalité de notre communauté et de la façon dont la collaboration permet de réaliser ce qui est impossible d’accomplir seuls.
La réussite de la mise en œuvre du Plan de développement communautaire 2022-2027 repose sur un vaste engagement de la part des forces dynamiques et vitales de notre communauté. Le Québec d’expression anglaise a évolué au fil des décennies, tout comme nos besoins et nos aspirations. De la Côte-Nord à la Côte-des-Neiges, nos communautés sont confrontées à un grand nombre de défis communs. Mais nous sommes également aux prises avec des besoins et des priorités de nature différente. Ce plan vise à répondre aux préoccupations communes et individuelles de notre communauté de communautés. Nous sommes impatients de travailler — avec toutes nos communautés — pour favoriser, entretenir et promouvoir leur vitalité.
Directrice générale
Quebec Community Groups Network
GUIDER LES EFFORTS COLLECTIFS DE LA COMMUNAUTÉ D’EXPRESSION ANGLAISE DU QUÉBEC
CADRE POUR UNE ACTION COMMUNAUTAIRE COLLECTIVE
INTRODUCTION
Travaillons ensemble pour une communauté plus dynamique : le Plan de développement communautaire 2022-2027 pour le Québec d’expression anglaise fournit un cadre aux actions collectives à entreprendre dans l’ensemble du secteur communautaire pour améliorer la vitalité de notre communauté des communautés. Grâce à des mesures coordonnées et stratégiques, notre communauté affirme collectivement son contrôle et oriente l’ensemble des ressources allouées et disponibles pour assurer son développement.
Régi par des tables rondes sur la vitalité communautaire, le Plan de développement communautaire réunit des intervenants de toute la communauté d’expression anglaise du Québec pour élaborer des stratégies et superviser leur mise en œuvre. Les tables rondes sont des entités autonomes, présidées par des représentants communautaires indépendants.
Le QCGN sert d’interlocuteur officiel entre Patrimoine canadien et la communauté d’expression anglaise du Québec. Il est un intervenant majeur auprès de plusieurs ministères identifiés dans la stratégie du gouvernement du Canada pour soutenir la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ainsi, le QCGN est responsable de fournir un soutien de base constant aux tables rondes.
The QCGN serves as official interlocutor between Canadian Heritage and Quebec’s English-speaking community. It is a major stakeholder of multiple departments identified in the Government of Canada’s strategy to support the vitality of Official Language Minority Communities. Thus, the QCGN is responsible for providing ongoing backbone support to the Roundtables.
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Depuis 2020, plus de 500 Québécois d’expression anglaise, dont des représentants de dizaines d’organismes communautaires, ont exprimé les besoins et les aspirations de plusieurs régions et secteurs du Québec, travaillant ensemble pour définir les besoins et les priorités de notre communauté des communautés.
Notre plan de développement communautaire 2022-2027 fournit un plan directeur : des stratégies et des actions claires qui contribueront à la vitalité de notre communauté. Il identifie les résultats souhaités, organisés en quatre domaines de développement distincts, mais qui se chevauchent : le financement, les données, la représentation et la santé de l’organisation et du réseau. Chacun de ces quatre domaines est issus de thèmes qui émergent du processus de consultation. Chacun est supervisé par sa propre table ronde.
Les quatre domaines de développement sous-tendent les problèmes structurels auxquels nous sommes tous confrontés dans le secteur communautaire. Le Plan de développement communautaire a également identifié une série de 14 résultats souhaités. Ceux-ci, à leur tour, sont structurés de façon à encadrer un large éventail de stratégies et d’actions. L’objectif commun est d’accroître la vitalité communautaire de manière à refléter et à encourager les priorités communes.
La version initiale du plan de développement communautaire 2022-2027 a été rendue publique lors du forum Taking Action for a More Vital Community qui s’est tenu le 15 mars 2022. Une version actualisée, validée le 27 juin dans le cadre des tables rondes communautaires, a été entérinée le 22 juillet par le conseil d’administration du QCGN.
À PROPOS DE LA COMMUNAUTÉ D’EXPRESSION ANGLAISE
CAPITALE, MAIS VULNÉRABLE
En 2016, la population d’expression anglaise du Québec comptait 1,1 million de personnes, soit 13,7 % de l’ensemble de la population de la province. Au recensement de 2021, en utilisant la même variable de la première langue officielle parlée (PLOP), le nombre de citoyens anglophones s’élevait à 1,25 million, soit 14,9 % de la population du Québec. Notre communauté continue de croître. Statistique Canada prévoit que, d’ici 2036, nous atteindrons 1,7 million, soit 17,2 % de la population du Québec. Notre croissance est en grande partie attribuable à l’immigration. Ainsi, notre communauté évolue de manière à avoir un impact profond sur notre identité globale, notre organisation structurelle, la façon dont nous exprimons nos identités et nos relations avec la majorité francophone du Québec.
La communauté d’expression anglaise du Québec est la plus diversifiée des communautés de langue officielle en situation minoritaire du Canada. Plus d’un tiers (36 %) des immigrants au Québec parlent l’anglais. On se doit de célébrer cette diversité et, en même temps, de reconnaître que l’évaluation des défis, des priorités et des besoins communs est une tâche de plus en plus délicate.
Pendant des décennies, le Québec d’expression anglaise a été soumis à des stéréotypes persistants, dépeignant ses membres comme une minorité uniformément aisée, dotée d’un bastion de privilèges au sein de la belle province. Nous devons lutter contre le mythe persistant, selon lequel les Québécois d’expression anglaise constituent une élite choyée et exclusive. En 2016, le taux de chômage de notre communauté était de deux points de pourcentage supérieurs à celui de la majorité francophone de la province. En comptant le chômage des jeunes, l’ampleur de cet écart doublait pour atteindre quatre points.
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Dans 15 des 17 régions administratives du Québec, le taux de chômage est plus élevé chez les anglophones que chez les francophones. La disparité entre les deux taux de chômage atteignent un sommet de 14 points de pourcentage sur la Côte-Nord. En 2016, la proportion de notre communauté vivant sous le seuil de faible revenu (SFR) était de 17,8 %, soit nettement plus que les 11,9 % des Québécois d’expression française. Pour relever ces défis et d’autres sérieux problèmes, notre communauté devra mettre en place des programmes novateurs et créatifs.
Les Québécois d’expression anglaise considèrent notre communauté comme essentielle, mais vulnérable. Une étude du ministère du Patrimoine canadien, publiée en novembre 2019, a conclu qu’une bonne moitié – 50 % – des Québécois d’expression anglaise ne croient pas que l’état de notre communauté linguistique sera fort et plus stable dans 20 ans. Plusieurs tendances démographiques posent un véritable défi à la survie de nos institutions et à la vitalité future de notre communauté.
Rien ne démontre mieux la nature périlleuse de ces tendances – et le défi de taille posé à notre communauté – que l’essence même et le meilleur indicateur de la vitalité future de nos communautés : ce qui a été fait à nos écoles de langue anglaise. Depuis 1971, les inscriptions dans les écoles anglaises publiques et privées ont subi un déclin considérable. Selon le ministère de l’Éducation du Québec et l’Institut de la statistique du Québec, le nombre d’élèves inscrits dans les secteurs public et privé de langue anglaise a chuté de 61,3 % du début des années 1970 à aujourd’hui. Pour l’année scolaire 1971-1972, le nombre d’inscriptions était de 256 251. En 2019-2020, ce chiffre a chuté à 99 042. Dans le même temps, le système français a également connu une baisse de ses inscriptions : de 1 378 788 en 1971-1972, ce nombre est passé à 981 905 en 2019-2020, soit une diminution de 28,8 %.
Il est essentiel de noter que la baisse marquée des inscriptions dans les écoles anglaises du Québec ne s’est pas limitée aux décennies qui ont immédiatement suivi l’adoption, en 1977, de la Charte de la langue française (Loi 101) par le gouvernement du Québec.
La baisse de la fréquentation des écoles anglaises persiste alors que les inscriptions dans le système francophone ont rebondi. D’autres facteurs ont contribué à la baisse des inscriptions. Il s’agit notamment de l’exode de familles entières et de jeunes anglophones du Québec, de la tendance des parents des régions rurales et éloignées à envoyer leurs enfants dans les écoles françaises voisines et de la forte augmentation du nombre de parents qui inscrivent leurs enfants à l’école française (malgré leur droit à l’école anglaise en vertu de la Loi 101) afin de s’assurer qu’ils acquièrent de solides compétences bilingues et qu’ils puissent mieux s’intégrer à la vie culturelle du Québec.
Ces tendances dévoilent un ensemble de besoins au sein de la communauté d’expression anglaise qui sont mal compris non seulement par la communauté de la langue majoritaire, mais aussi par les décideurs politiques et les organes opérationnels des gouvernements provinciaux et fédéral. Par conséquent, le soutien dont notre communauté a besoin n’est pas toujours disponible, malgré une assise factuelle exceptionnellement fiable qui documente si solidement ces besoins.
Nos organismes communautaires ont besoin d’investissements soutenus dans leurs opérations de base, dans leur capacité d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques ainsi que dans la recherche. Nous avons également besoin de soutien pour établir des liens entre les membres de la communauté et nos institutions. Dans ces circonstances, le besoin profond d’encourager une nouvelle génération de leaders communautaires n’est pas le moindre des défis à relever.
UNE COMPRHÉNSION COMMUNE DE DÉFIS PARTAGÉS ET VITALITÉ
UNE COMMUNAUTÉ PLUS DYNAMIQUE
Les articles 42 et 43 de la Loi sur les langues officielles du gouvernement fédéral énoncent les responsabilités du gouvernement du Canada sur les mesures à prendre pour favoriser l’épanouissement des communautés francophones et anglophones en situation minoritaire.
Pour évaluer leurs progrès, les orientations proposées s’appuient sur le Cadre de référence sur la vitalité des communautés de langues officielles en situation minoritaire publié par Patrimoine canadien. Élaboré par des experts en matière de langue minoritaire et par des groupes communautaires dans tout le Canada, ce cadre de référence identifie 15 facteurs essentiels pour assurer la vitalité de ces communautés. Alors que la Loi sur les langues officielles consacre le principe de responsabilité du gouvernement du Canada afin de favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM), les organismes et institutions communautaires du Québec d’expression anglaise sont sur le terrain pour veiller à la reconnaissance et à la mise en œuvre de ces facteurs.
En 2001, le QCGN a formé un comité directeur pour présenter un plan de développement global. Entre 2002 et 2004, il a établi un cadre, des objectifs et un processus de consultation à l’échelle de la communauté. Le Plan de développement communautaire pour les communautés anglophones du Québec 2005-2010 (brochure en anglais) qui en a résulté comprenait un large éventail d’activités ciblées liées à des indicateurs clés de rendement. Les leaders communautaires ont défini ces indicateurs dans d’importants secteurs d’activité, dont l’éducation, l’emploi, la santé et les services sociaux.
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L’Entente de collaboration 2011 (document en anglais), entre le QCGN agissant au nom de la communauté d’expression anglaise et Patrimoine canadien, a donné au QCGN le mandat de recueillir, de colliger et d’énoncer les priorités de la communauté d’expression anglaise. Un comité directeur pour l’établissement des priorités (CDEP) a alors été formé pour servir de mécanisme chargé de recueillir ces priorités. Les membres du comité ont lancé le Forum sur les priorités stratégiques, un processus cyclique de cinq ans de consultation structuré à l’échelle de la communauté pour cerner les besoins et les priorités des Québécois d’expression anglaise et du secteur communautaire qui les soutient.
À la suite des consultations régionales et sectorielles et d’un sondage mené à l’échelle de la communauté auprès de plus de 500 anglophones, plus de 100 dirigeants communautaires se sont réunis le 25 mars 2012 à Montréal dans le cadre d’une conférence d’établissement des priorités communautaires. À l’issue de la conférence, les leaders sont parvenus à un consensus autour d’une Déclaration de la conférence d’établissement des priorités de la communauté d’expression anglaise du Québec, fixant ainsi six secteurs prioritaires pour la communauté qui, après une décennie, ont toujours une validité claire et durable :
- Accès aux services en langue anglaise
- Développement communautaire
- Prospérité économique
- Identité et renouvellement
- Leadership et représentation
- Institutions solides
Les objectifs du Forum sur les priorités stratégiques ont servi de base aux Stratégies habilitantes et priorités de la communauté d’expression anglaise du Québec 2012-2017 qui ont permis d’entamer un cycle de planification de cinq ans avec des vérifications annuelles auprès des intervenants communautaires. Le processus a été réorienté, en partie, pour permettre aux priorités énoncées par la communauté d’influencer les stratégies du gouvernement du Canada en matière de langues officielles, maintenant connues sous le nom de Plan d’action pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Ces six priorités continuent de servir de base aux exercices annuels d’établissement des priorités utilisés par Patrimoine canadien pour déterminer les possibilités de financement et de développement et pour communiquer les priorités communautaires aux autres ministères fédéraux et aux autres ordres de gouvernement.
En 2018, le gouvernement du Canada a présenté son Plan d’action pour les langues officielles – 2018-2023 : Investir dans notre avenir. Durant l’été 2018, le CDEP a été chargé d’entreprendre un processus de consultation. Ce processus a réaffirmé le soutien de la communauté aux six priorités fondamentales. Il a également permis d’introduire le concept de Plan de croissance en tant que mécanisme inclusif pour aborder la vulnérabilité de notre communauté de communautés et garantir un processus de consultation complet et dirigé par ses membres. Le Plan de croissance est né de la nécessité de mettre en place un processus d’établissement des priorités reposant sur la communauté avec un caractère plus inclusif, plus transparent et plus responsable.
Depuis janvier 2020, le secteur communautaire, représentant les Québécois d’expression anglaise, a engagé un dialogue continu qui a permis à notre communauté de développer une compréhension commune des défis et de leur vitalité. Comme nous l’avons indiqué précédemment, quatre tables rondes communautaires ont été formées à l’été 2021 afin d’identifier des stratégies pour aborder quatre facteurs critiques d’intérêt commun : les données, le financement, la représentation et la santé des organismes et des réseaux. Présents dans toutes les sphères d’activité, dans les régions ainsi que dans les centres urbains, ces quatre points ont des implications pour les organismes au service de diverses communautés au sein du Québec d’expression anglaise. Détaillés ci-dessous, ils constituent un cadre pour une croissance communautaire gérée en fonction des priorités de la communauté.
DONNÉES
La compréhension des données sociodémographiques et autres données concernant notre communauté est essentielle pour que nos organismes et institutions puissent concevoir des programmes efficaces et plaider pour de meilleures politiques, de meilleurs programmes et un meilleur financement. Les organismes du secteur communautaire citent de multiples obstacles. Mentionnons, entre autres, le coût de la collecte des données, le manque de formation et d’expertise à l’interne et l’absence générale de documentation et de paramètres cohérents permettant de suivre correctement les tendances essentielles à la vitalité de la communauté. Ces lacunes généralisées entravent gravement la capacité de notre communauté à prendre des décisions fondées sur des données probantes et paralysent largement le processus nécessaire pour défendre avec autorité et efficacité les besoins et les priorités de la communauté.
La collecte et la diffusion de ces données sont complexes en raison de plusieurs facteurs. L’un des problèmes fondamentaux est que la communauté d’expression anglaise du Québec et les personnes considérées comme en faisant partie sont définies différemment par différents intervenants. Un exemple notable est la divergence entre la langue maternelle et la première langue officielle parlée (PLOP) décrite plus haut dans ce plan. Les organismes au service des Québécois d’expression anglaise préfèrent cette dernière : elle fournit une mesure beaucoup plus précise par rapport aux indicateurs clés de leur vitalité, comme la langue dans laquelle une personne souhaite recevoir des services. C’est également la variable utilisée par la plupart des ministères et organismes fédéraux, dont Patrimoine canadien et le Commissariat aux langues officielles. L’absence de consensus sur la façon de compter le nombre de Québécois d’expression anglaise entraîne souvent des erreurs, des lacunes ou des oublis importants lors de l’élaboration de politiques publiques et, dans certains cas, elle peut servir d’excuse ou de justification. Cette lacune se traduit par une situation particulièrement difficile et décourageante au Québec, étant donné que le gouvernement provincial utilise un chiffre beaucoup plus restrictif de la langue maternelle, que l’on comptabilise à 639 365.
FINANCEMENT
Les organismes œuvrant auprès des Québécois d’expression anglaise ont traditionnellement reçu la part du lion de leur financement par le biais d’initiatives et de programmes fédéraux. La principale source de ce financement est le Plan d’action pour les langues officielles. Celui-ci représente actuellement un investissement de 2,7 milliards de dollars sur cinq ans pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM) du Canada. De ce montant, la communauté d’expression anglaise du Québec reçoit le plus faible investissement par habitant de toutes les CLOSM. L’enveloppe de financement fédéral, rendue disponible par le Plan d’action, a dépensé uniquement 48,65 $ par Québécois d’expression anglaise au cours de l’exercice 2018-2019. Après le Québec, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick sont les provinces ayant obtenu les financements les plus faibles par habitant au cours du même exercice financier. Leur allocation était respectivement de 134,99 $ et 124,38 $ par membre des CLOSM, ce qui, dans les deux cas, représente plus du double de l’allocation allouée au Québec anglophone. Parmi d’autres provinces, Terre-Neuve-et-Labrador a reçu le financement le plus élevé par habitant des CLOSM, soit 1 349,01 $. Dans les territoires, le montant par habitant variait de 6 000 $ à 9 000 $.
Il est possible de retracer les origines de la plupart des principales difficultés liées à notre vitalité dans les secteurs fondamentaux régis par la juridiction provinciale. Le rôle de soutien et de compréhension aux provinces est à la fois essentiel et crucial. Le gouvernement du Québec investit annuellement 1,1 milliard de dollars dans le secteur communautaire. Toutefois, selon les propres estimations du gouvernement du Québec, les organismes au service des Québécois d’expression anglaise ne reçoivent que 3 % de ce montant.
Ce sous-financement est aussi profond que systémique.
Il n’est guère nécessaire de souligner la grande disparité, l’iniquité claire et évidente ainsi que l’effet désastreux et nettement préjudiciable de ce degré considérable de sous-financement.
Il est également inutile d’insister sur la manière dont cette approche restreint la plupart de nos organisations. Il suffit de dire qu’il est temps d’aborder et de résoudre les problèmes systémiques qui empêchent notre communauté de recevoir une part équitable de ces fonds. Cette situation empêche notamment de nombreux groupes d’avoir accès à des ressources vitales ou d’être assurés d’une continuité grâce à une dotation stable en personnel. En attendant, de nombreux groupes sont contraints de compter sur un financement épisodique pour leurs projets spéciaux afin de soutenir ce qui devrait être reconnu et financé, comme le sont les opérations de base. En outre, les groupes ont besoin de plus d’informations sur les sources de financement disponibles.
SANTÉ DE L’ORGANISATION ET DU RÉSEAU
Selon un rapport de 2012 du Centre des organismes communautaires, on estime qu’environ 800 des 5 000 groupes servent principalement les populations d’expression anglaise, bilingues ou ethnoculturelles. Des dizaines d’organismes communautaires provinciaux, régionaux et sectoriels ont une mission reconnue de service à la communauté d’expression anglaise, offrant des programmes et des services essentiels à leurs populations. Selon les tables rondes sur la vitalité communautaire, ces organismes gagneraient beaucoup à travailler ensemble pour définir et défendre des intérêts communs tout en répondant aux besoins quotidiens de leurs organisations. Des réseaux officiels existent pour faciliter ce travail de collaboration, mais les intervenants ne sont pas tous au courant de ces réseaux et, dans certains cas lorsqu’ils le sont, ils n’ont pas la capacité opérationnelle et financière d’y participer.
La création d’un réseau plus collaboratif a été l’un des principaux thèmes des consultations menées en 2020 par le QCGN. Étant donné la diversité croissante au sein de la communauté d’expression anglaise du Québec, les intervenants ont de la difficulté à atteindre un consensus quant à leur capacité à « parler d’une seule voix ». Les réseaux, dont le QCGN, jouent un rôle essentiel en soutenant les organismes qui font face quotidiennement à une multitude de défis. Notons parmi ceux-ci :
- l’accès au financement
- l’accès aux données
- la capacité de répondre aux demandes de l’organisme
- la gestion des processus de gouvernance
- le recrutement, la formation et la rétention du personnel, des bénévoles et des membres.
Les organismes ont fait état d’un manque de coordination et d’échange d’informations entre les organismes autour des grands événements. La surcharge d’événements – le fait que l’on s’attende à ce que les organismes participent à de multiples événements de réseautage et de consultation tout en assurant la surveillance de leurs propres opérations – pose un défi important aux organismes dont le personnel et les capacités sont limités. Les intervenants ont discuté de la nécessité de collaborer plus étroitement avec les institutions, notamment, mais pas exclusivement, avec les établissements universitaires afin d’améliorer la sensibilisation aux meilleures pratiques, d’encourager l’acquisition de ressources et de la formation nécessaires pour les adopter, et de bonifier la capacité des organisations à accéder à des informations de meilleure qualité.
REPRÉSENTATION
La sous-représentation de notre communauté dans la fonction publique du Québec constitue depuis longtemps un obstacle important à notre vitalité collective. Depuis les années 1970, la proportion d’anglophones de langue maternelle travaillant pour le gouvernement du Québec oscille autour de 1%. La représentation des anglophones est plus élevée dans l’ensemble de la composante québécoise de la fonction publique fédérale, mais des défis importants persistent à l’extérieur de la région de la capitale nationale et dans certains secteurs. Par conséquent, les fonctionnaires, à tous les échelons du gouvernement, font preuve d’un manque manifeste de compréhension des besoins de notre communauté en situation minoritaire et des défis auxquels nous sommes confrontés.
Les intervenants de la communauté ont identifié ce problème comme étant récurrent. En l’absence d’une représentation efficace dans le secteur public, les besoins particuliers de notre communauté ne sont pas pris en compte ni traités dans les décisions relatives aux politiques et aux programmes. On les ignore souvent, tout simplement. En plus d’exercer un impact négatif sur la vitalité de nos organismes et de nos institutions, cette dynamique se traduit également par un manque d’informations gouvernementales disponibles en anglais.
Il importe également de créer et de maintenir les infrastructures nécessaires pour que notre communauté de communautés puisse être pleinement entendue. La communauté d’expression anglaise est de plus en plus diversifiée. Elle se caractérise à la fois par une population vieillissante et par une jeune génération confrontée à des défis entièrement nouveaux. Un travail concerté s’avère nécessaire pour aider ces populations distinctes à collaborer et à aligner leurs priorités pour atteindre leurs objectifs communs.